Chroniques d'ilissiæ

Hélène releva la tête, se sentant observée. Rien, aucun animal, aucun homme. Elle projeta son esprit dans les buissons mais ne détecta rien d'anormal. Elle soupira.
Une fois de plus, elle s'était plongée dans la contemplation de la source près de laquelle elle vivait, le murmure du ruisseau argenté sur les pierres ayant, comme à son habitude, perturbé son esprit.
Hélène était une jeune fille de dix-sept ans. Elle avait vécu toute se vie près de ladite source, dans la Forêt Enchantée, au Sud d'Ara-Ëlis. Ses cheveux bruns et bouclés retombaient en cascade sur le haut de son dos. Son nez droit était dominé par des yeux en amande d'un vert magnifique, couleur de l'émeraude. Elle avait toujours maîtrisé l'art des Enchantements, et, comme toute Enchanteresse qui se respecte, savait se battre. En l'occurrence, bien qu'elle soit grande, elle était peu musclée, mais quand elle avait une rapière dans la main, Hélène pouvait rapidement tuer n'importe quel adversaire.
Le bruissement des feuilles qu'elle entendit derrière elle lui évita un bain, sa réaction ayant été assez rapide pour qu'elle évite l'attaque en se métamorphosant en un chat blanc aux yeux turquoise. Déséquilibrée, l'assaillante vacilla un instant avant de plonger dans l'eau, tête la première, quand Hélène la poussa, toujours sous sa forme animale. Elle reprit son apparence initiale, regardant d'un air amusé la fille qui était dans l'eau.
- Hélène ! Je me serais passée de la douche ! Pourquoi as-tu fait ça ? demanda-t-elle.
- Tu allais me pousser ! Je n'ai fait que prendre mes précautions ! répliqua l'autre.
- Tu t'es transformée ! Tu sais pourtant que tu ne dois pas le faire !
- Théodora, ne me ressors pas ce vieux couplet, je l'ai entendu suffisamment de fois par la bouche de Maîtresse Irène ! gémit Hélène.
- Allez, ne fais pas la tête ! Viens plutôt manger un morceau. Tu dois avoir faim, après ce dur entraînement ! rit Théodora.

Et elle se précipita vers la maison d'Hélène. Cette jeune femme de dix-neuf ans était la seule amie d'Hélène. Elles s'étaient rencontrées sept ans auparavant, quand Théodora était allée parfaire sa pratique de la magie dans la Forêt Enchantée. Contrairement à Hélène, qui était une Enchanteresse, Théodora était était une Mage des Éléments, c'est-à-dire qu'elle puisait sa force dans le monde alentour et non pas en elle.
Petite et fluette, elle avait une abondante chevelure blonde, souple et longue. Ses yeux bridés étaient marron et son nez était aquilin. Théodora ne se battait pas mais utilisait son bâton de magie, serti d'une améthyste, de façon redoutable.
Hélène vivait plus dans une cabane que dans une maison. Son habitation était un bâtiment en bois de chêne et le toit était recouvert de feuillage. La maison était organisée en cinq pièces : l'entrée, le salon, la cuisine, la chambre et, dans une même pièce, le trou des toilettes et le bac en bois faisant office de baignoire. Théodora vivait à quelques pas de là et, encore plus loin, se trouvait la maison de Maîtresse Irène, l'Enchanteresse qui avait formé Hélène. Théodora, elle, était éduquée par Maîtresse Naomy, qui vivait dans un village plus au sud de la Forêt Enchantée.

Hélène entra la première chez elle et vit, avec surprise, trois femmes dans son salon. La première était une femme d'apparence âgée, petite et musclée. Elle avait des cheveux blancs et lisses. Ses yeux grands ouverts, tout ronds, étaient marron. Elle avait un nez aquilin. Dans son dos était attachée une arme à la garde en cuir, que Hélène savait être un katana. En effet, cette femme était Maîtresse Irène.
Par contre, l'Enchanteresse ne connaissait les deux autres femmes. L'une était blonde aux yeux bleus, grande et très belle. La seconde était grande et maigre. Elle avait la peau mate, des cheveux bruns et des yeux noisette. La blonde avait une turquoise en pendentif et une autre incrustée à la garde en or de sa rapière. La brune avait deux dagues d'ébène à la taille. Une très fine cicatrice courait sur sa joue gauche. Elle avait au cou une fine chaîne argentée et, à son index droit, une bague dorée dans laquelle était incrustée un éclat de saphir. Sa robe noire avait une apparence étrange, qui faisait penser à des plumes.
- Maîtresse Irène, je vous salue ! dit Hélène en inclinant légèrement la tête.
- Bonjour Hélène. Comme tu peu le voir, tu as des invitées…
- Jeune Enchanteresse, je vous salue ! lança la blonde. Je suis Alissia, reine d'Ara-Ëlis. Et voici une amie, Célia.
- Bonjour jeune damoiselle, la salua cette dernière.
- Votre Majesté ! se prosterna Hélène. Dame Célia ! s'inclina-t-elle, un peu moins bas. Que me vaut l'honneur de votre visite ?
- Vous et votre amie, Théodora, êtes d'une puissance incroyable. Vous avez toutes deux un potentiel très impressionnant, commença Célia d'une voix grave. Je vais vous présenter au meilleur guerrier d'Ilissiæ, à la dirigeante des Loups de Naomy et à reine des Mages d'Outre-Temps. Tous les cinq, vous suivrez un entraînement dispensé par les dieux. Le but est de protéger Ilissiæ des géants et des korrigans, car, si mon impression est juste, ils projettent de nous détruire en commençant pas les royaumes de l'Est.
- Non… Vous devez faire erreur… balbutia Théodora, qui avait suivi la conversation. Nous sommes une Enchanteresse et une Mage des Éléments tout à fait normales.
- Elle à raison ! s'exclama Hélène. Maîtresse Irène, ne pouvez-vous pas le lui dire ?
- Non, Hélène, je ne peux pas. Je sais que Célia à raison. Et je pense que ce n'est qu'une question de jours avant que tu ne t'en rendes compte. Maîtresse Naomy te l'aurait bientôt dit, Théodora. Vous avez les potentiels les plus puissants que je n'ai jamais vu. Même Sa Majesté, qui est la fille de la Déesse-Louve, ne vous surpasse pas.
- La personne avec le potentiel le plus puissant avant vous, Hélène, était Naomy elle-même. Votre potentiel, Théodora, est plus important que celui de ma sœur, qui est pourtant la dirigeante des Loups de Naomy ! insista la reine. Demain, Maîtresse Irène et Maîtresse Naomy vous donneront leur dernier cours. Dans deux jours, nous nous reverrons, et j'irai avec vous jusqu'à Efi. Vous ferez connaissance avez les trois autres membres du groupe. Suite à cela, vous vous rendrez dans la Forêt des Trois Royaumes, où viendront vous rejoindre les dieux. Grâce à leur enseignement, vous deviendrez les Cinq Protecteurs d'Ilissiæ.
- Mais… est-il possible de refuser ? s'ensuit Hélène.
- Non, car il s'agit de votre destin, murmura Célia de façon énigmatique. Je dois m'en aller. Nous ne tarderons pas à nous voir de nouveau ! ajouta-t-elle.

Elle quitta la maison et, sans se faire remarquer, prit la forme d'un grand corbeau de jais qui disparut dans le lointain, haut dans les airs, tandis que la reine Alissia terminait sa discussion avec les trois autres.

Hélène releva la tête, se sentant observée. Rien, aucun animal, aucun homme. Elle projeta son esprit dans les buissons mais ne détecta rien d'anormal. Elle soupira.
Une fois de plus, elle s'était plongée dans la contemplation de la source près de laquelle elle vivait, le murmure du ruisseau sur les pierres ayant, comme à son habitude, perturbé son esprit.
Hélène était une jeune fille de dix-sept ans. Elle avait vécu toute sa vie près de la source de ce cours d'eau, dans la Forêt Enchantée, au Sud d'Ara-Ëlis. Ses cheveux bruns et bouclés retombaient en cascade sur le haut de son dos. Son nez droit était dominé par des yeux en amande d'un vert magnifique, couleur de l'émeraude. Elle avait toujours maitrisé l'art des Enchantements, et, comme toute Enchanteresse qui se respecte, savait se battre. En l'occurrence, bien qu'elle fut grande, elle était peu musclée, mais maniait sa rapière de façon mortelle pour n'importe quel adversaire.
Le bruissement des feuilles qu'elle entendit derrière elle lui évita un bain, sa réaction ayant été assez vive pour qu'elle évite l'attaque en se métamorphosant en un chant blanc aux yeux turquoise. Déséquilibrée, l'assaillante vacilla un instant avant de plonger dans l'eau, tête la première, quand Hélène la poussa, toujours sous sa forme animale. Elle redevint humaine, regardant d'un air amusé la fille qui était dans l'eau.
— Hélène ! Je me serais passée de la douche ! Pourquoi as-tu fait ça ? demanda-t-elle.
— Tu allais me pousser ! Je n'ai fait que prendre mes précautions ! répliqua l'autre.
— Tu t'es transformée ! Tu sais pourtant qu'il faut que tu restes sous ta forme humaine !
— Théodora, ne me ressors pas ce vieux couplet, je l'ai entendu assez de fois par lad bouche de Maîtresse Irène ! gémit Hélène.
— Allez, ne fais pas la tête ! Viens plutôt manger un morceau, tu dois avoir faim, après ce dur entraînement, rit Théodora.

Et elle se précipita vers la maison d'Hélène. Cette jeune femme de dix-neuf ans était la seule amie d'Hélène. Elles s'étaient rencontrées sept ans auparavant, quand Théodora était allée parfaire sa pratique de la Magie dans la Forêt Enchantée. Contrairement à Hélène, qui était une Enchanteresse, Théodora était une Mage des Éléments, c'est-à-dire qu'elle puisait sa force dans le monde alentour et non pas en elle.
Petite et fluette, elle avait une abondante chevelure blonde, souple et longue. Ses yeux bridés étaient marrons et son nez était aquilin. Théodora ne se battait pas mais utilisait son bâton de magie, serti d'une améthyste, de manière redoutable.
Hélène vivait plus dans une cabane que dans une maison. Son habitation était un bâtiment de bois de chêne et le toit était recouvert de feuillage. La maison était organisée en cinq pièces : l'entrée, le salon, la cuisine, la chambre, et, dans une même pièce, le trou des toilettes et le bac en bois qui faisait office de baignoire. Théodora vivait à quelques pas de là et, encore plus loin, se trouvait la maison de Maîtresse Irène, l'Enchanteresse qui avait formé Hélène. Théodora, elle, suivait les enseignements de Maîtresse Naomy, qui vivait dans un village plus au sud de la Forêt Enchantée.

Hélène entra la première chez elle et vit, avec surprise, trois femmes dans son salon. La première était d'apparence âgée, petite et musclée. Elle avait des cheveux blancs et lisses. Ses yeux grands ouverts, tout ronds, étaient marrons. Elle avait un nez aquilin. Dans son dos était attachée une arme à la garde en cuir que Hélène savait être un katana. En effet, cette femme était Maîtresse Irène.
Cependant, l'Enchanteresse ne connaissait pas les deux autres femmes. L'une était blonde aux yeux bleus, grande et très belle. La seconde état grande et maigre. Elle avait la peau mate, des cheveux bruns et des yeux noisette. La blonde avait une turquoise en pendentif et une autre incrustée sur la garde en or de sa rapière. La brune avait deux dagues à la garde d'ébène accrochées à la taille. Une très fine cicatrice courait sur sa joue gauche. Elle avait au cou une fine chaîne argentée et, à son index droit, une bague dorée dans laquelle était logé un éclat de saphir. Sa robe noire avait une apparence étrange, qui faisait à des plumes.
— Maîtresse Irène, je vous salue ! dit Hélène en inclinant légèrement la tête.
— Bonjour Hélène. Comme tu peux le voir, tu as des invitées…
— Jeune Enchanteresse, je vous salue ! lança la blonde. Je suis Alissia, reine d'Ara-Ëlis. Et voici une amie, Célia.
— Bonjour, jeune demoiselle, la salua cette dernière.
— Votre Majesté ! se prosterna Hélène. Dame Célia ! s'inclina-t-elle, un peu moins bas. Que me vaut l'honneur de votre visite ?
— Vous et votre amie Théodora êtes d'une puissance incroyable. Vous avez toutes deux un potentiel très impressionnant, commença Célia d'une voix grave. Je vais vous présenter au meilleur Guerrier d'Ilissiæ, à la dirigeante des Loups de Naomy et à la Reine des Mages d'Outre-Temps. Tous les cinq, vous suivrez un entraînement dispensé par les Dieux. Le but est de protéger Ilissiæ des korrigans et des géants, car, si mon impression est juste, ils projettent de nous détruire en commençant par les Royaumes de l'Est.
— Non… Vous devez faire erreur… balbutia Théodora, qui avait suivi la conversation. Nous sommes une Enchanteresse et une Mage des Éléments tout à fait normales.
— Elle a raison ! s'exclama Hélène. Maîtresse Irène, ne pouvez-vous pas le lui dire ?
— Non Hélène, je ne peux pas. Je sais que Célia a raison. Et je pense que tu t'en rendras compte par toi-même les prochains jours. Maîtresse Naomy te l'aurait bientôt dit, Théodora. Vous avez les potentiels les plus puissants que je n'ai jamais vus. Même Sa Majesté, qui est la fille de la Déesse-louve ne vous surpasse pas.
— La personne avec le potentiel le plus puisant avant vous, Hélène, était Naomy en personne. Quant au votre, Théodora, il est plus important que celui de ma sœur, qui pourtant dirige les Loups de Naomy ! insista la reine. Demain, Maîtresse Irène et Maîtresse Naomy vous donneront leur dernier cours. Dans deux jours, nous nous reverrons, et j'irai avec vous jusqu'à Efi. Vous y ferez la connaissance des trois autres membres du groupe. Suite à cela, vous vous rendrez dans la Forêt des Trois Royaumes, où les Dieux vous rejoindront. Grâce à leur enseignement, vous deviendrez les Cinq protecteurs d'Ilissiæ.
— Mais… est-il possible de refuser ? s'enquit Hélène.
— Non car il s'agit de votre destin, murmura Célia de façon énigmatique. Je dois m'en aller. Nous ne tarderons pas à nous voir de nouveau ! ajouta-t-elle.

Elle quitta la maison et, sans se faire remarquer, prit la forme d'un grand corbeau de jais qui disparut dans le lointain, haut dans les airs, tandis que la reine Alissia terminait sa discussion avec les trois autres.
— Vous savez, Hélène, il s'agit d'un immense honneur ! Si vous acceptez, vous deviendrez plus puissante que ma sœur et peut-être même plus que Naomy elle-même. Le privilège de rencontrer les Dieux a été offert à peu de personnes, et seuls les Loups peuvent encore en parler.
— Excusez-moi, Votre Majesté, mais Dame Célia n'a-t-elle pas dit que la reine des Mages d'Outre-Temps ferait partie du groupe ? s'enquit Théodora. Vous savez pourtant qu'il y a une animosité très forte entre son ordre et celui des Loups, animosité qui a entraînée plusieurs guerres. D'ailleurs, je suis moi-même une ennemie des Mages !
— Je le sais, Théodora, rassurez-vous. Mais si des ennemis arrivaient à s'entendre, cela ne serait-il pas un grand pas pour la paix en Ilissiæ ? Une paix durable entre Ara-Ëlis et l'empire du Nord ?
— Votre Majesté a raison, admit la Mage des Éléments. Je dois rejoindre Maîtresse Naomy ! s'écria-t-elle soudainement. Je reviens manger tout à l'heure, Hélène. Au revoir, Votre Majesté !
— À bientôt et pensez à faire vos adieux à Maîtresse Naomy ! lança la reine alors que Théodora s'éloignait en courant. Je vais moi aussi prendre congé, je dois retourner à Efi où certaines obligations royales m'attendent, et je dois avouer que ce n'est pas très réjouissant. Nous nous reverrons dans deux jours, Hélène, termina la reine avant de se dématérialiser.
— Au revoir, Votre Majesté, soupira Hélène.

Hélène, encore surprise par l'annonce de son futur, s'écroula sur une chaise en bois en sanglotant. Irène s'approcha d'elle pour la consoler. Elles restèrent ainsi immobiles de longues minutes jusqu'à ce qu'Hélène dise enfin :
— C'est impossible. Je ne peux pas quitter la Forêt Enchantée après toutes ces années. Il y a forcément une erreur quelque part !
— Connais-tu beaucoup d'Enchanteurs ou d'Enchanteresses pouvant changer d'apparence ?
— Vous, Maîtresse Irène. Vous savez vous transformer en cheval.
— Comme tous les membres de mon peuple. Je suis une Equusienne, Hélène. Une Equusienne en fuite depuis de nombreuses années. Trop nombreuses à mon goût.
— Vous… vous êtes une Equusienne ? Pourquoi ne m'en avez-vous jamais parlé ?
— Je devais me cacher. Il y a quarante-sept ans, le peuple des Equusiens, bien que pacifique, s'est révolté contre leurs dirigeants. Malheureusement pour moi, il se trouve que c'est ma famille qui était au pouvoir à ce moment-là. Mes parents se sont sacrifiés pour que je puisse vivre. Un jour, je les vengerai ! Mais en attendant, chaque jour, je revois leurs visages et leurs voix me criant de fuir, dit-elle, des larmes ruisselant silencieusement sur ses joues.
— Oh ! Je suis désolée pour vous. Et si vous n'en parlez pas, c'est par crainte de vos ennemis ? Et pourquoi m'avez-vous si longtemps interdit de prendre ma forme animale ?
— Je n'en parle pas non seulement par crainte, mais aussi par tristesse. Et je t'ai interdit de te métamorphoser pour que des ennemis ne te repèrent pas. Je suis au courant du projet de Célia et d'Alissia depuis que je t'ai recueillie. Elles m'avaient demandé de t'enseigner tout mon savoir, mais ont précisé que tu devais rester sous forme humaine. Je n'ai fait qu'obéir aux ordres.
— Mais si vous m'avez appris tout ce que vous savez, que m'apprendrez-vous demain ? s'enquit l'élève, perdue.
— Nous travaillerons sur toi. Lorsque tu es chat. Mais pour l'instant, repose-toi, car demain sera une dure journée. Prépare ta rapière, elle te sera utile par la suite.

Sur ses mots, Irène quitta la pièce. La jeune femme resta assise, trop secouée pour faire le moindre geste ou pour mettre en œuvre la plus petite des pensées qui se bousculaient dans son crâne.
Enfin, elle se leva pour mettre plusieurs de ses robes dans un sac. Elle saisit sa rapière à lame d'argent et garde d'or, cette dernière représentant un dragon aux ailes repliées sur la poignée. De la sorte, la main porteuse était rendue invulnérable ou presque, à condition de ne pas lâcher l'arme évidemment.
Ses affaires prêtes, l'Enchanteresse commença à préparer le repas du soir. Elle attendrait Théodora et elles mangeraient devant le feu, comme elles l'avaient fait tant de fois en sept ans. Ce serait par ailleurs la dernière fois qu'elles prendraient un repas ensemble dans la Forêt Enchantée. En une seule journée, la vie d'Hélène avait basculé. Elle qui, la veille, était une apprentie Enchanteresse comme tant d'autres, devait devenir membre des Cinq protecteurs d'Ilissiæ. Il lui tardait de rencontrer les trois personnes qu'elle ne connaissait pas encore.
Quelques minutes seulement après avoir commencé la confection du repas, on frappa à la porte. L'énergie de la personne qui se tenait devant celle-ci indiqua à Hélène qu'il s'agissait de Théodora. Elle alla lui ouvrir. Mais la Théodora qui lui fit face n'était pas la Théodora qu'elle voyait habituellement.
Elle vit instantanément les yeux rougis de la Mage des Éléments, et entendit son souffle court. Sa tunique était déchirée, comme si elle avait coupé au travers des arbres et non emprunté le chemin.
— Théodora… que se passe-t-il ?
— Des korrigans ont attaqué le village. Il y a eu des morts. Et… Maîtresse Naomy et de ceux-là.
— Avez-vous éliminé vos ennemis ?
— Non… ils sont insensibles à la magie ! Ils nous ont lancé des boules enflammées qui ont tout détruit sur leur passage. Ils m'ont poursuivie quand je me suis enfuie.
— Partons ! Allons trouver Maîtresse Irène et fuyons vers Efi.

Hélène attrapa son sac d'une main et glissa sa rapière dans son dos de l'autre. Grâce à sa magie, elle serra les sangles du fourreau autour de sa poitrine.
Les deux jeunes femmes coururent chez l'Equusienne. Celle-ci fut mise au courant de la situation par Théodora, puis elle vers le nord accompagnée des deux jeunes femmes.
Alors que le groupe débouchait sur les Grandes plaines d'Ara-Ëlis, trois créatures humanoïdes de couleur verte, chauves et aux yeux bleus leur barrèrent la route. C'étaient des korrigans. Le premier d'entre eux fut embroché par le katana d'Irène et Hélène étêta le deuxième. Ils n'eurent pas le temps de réagir et eurent droit à une mort rapide et indolore. Le dernier se précipita sur Théodora, qui érigea un mur de flammes pour se protéger – protection qui n'affecte nullement la créature. Mais heureusement pour Théodora, au moment où le korrigan allait lui planter son coutelas dans le cœur, trois loups sortirent de nulle part. Ils lui arrachèrent le cœur et le dévorèrent.
Sous les yeux ébahis de la jeune Mage, les deux loups noirs et le blanc prirent une forme humaine. Le premier d'entre eux, un loup noir sous sa forme animale, avait des cheveux blonds et des yeux d'un bleu pur. Il paraissait avoir vingt ans. Ce jeune homme avait la peau foncée et un nez crochu. À sa main droite, un bracelet de cuir retenait un béryl. À la ceinture de son pantalon de soie beige était accroché une arme dont la taille laissait deviner un poignard à la garde d'or.
Le second loup noir, qui était en réalité une louve, était une femme d'approximativement vingt-cinq ans. Elle avait des cheveux châtains qui lui arrivaient aux épaules et des yeux en amande de couleur verte. Son nez était droit et sa bouche, fine. À son cou, une chaîne en argent retenait une aigue-marine. La jeune femme portait un arc en bandoulière et les sangles en cuir du carquois étaient visibles sur sa robe blanche.
Le loup blanc était un homme d'un âge avancé, une cinquantaine d'année à première vue, dont les cheveux gris étaient en bataille et aux yeux bleus. Avec une affreuse cicatrice sur la joue gauche, bien que cette dernière lui donnât un certain charme, il ne passait pas pour l'homme le plus charmant d'Ilissiæ. Sur sa tête se trouvait une fine couronne retenant une turquoise. Une dioptase, retenue par un lacer de cuir, tombait sur sa chemise de soie blanche. Une garde dorée était visible au-dessus de chacune de ses épaules.
— Loups de Naomy, à votre service, Mesdemoiselles. Je vous présente son Altesse Clément, Prince héritier d'Ara-Ëlis, dit la jeune femme en désignant le plus âgé des trois. Le jeune homme à ma gauche est Alaric, présenta-t-elle en désignant le second, et je me nomme Cassandre. La déesse elle-même nous a demandé de vous escorter jusqu'à Efi.
— Bonjour. Je suis Théodora, murmura la jeune femme, et voici Hélène et Maîtresse Irène, toutes deux Enchanteresses, ajouta-t-elle en désignant les deux autres, qui s'étaient approchées.
— Votre Altesse, Dame Théodora, Sire Alaric, je vous enchantée de faire votre connaissance ! les salua Hélène en s'inclinant tour à tour devant chacun d'eux.
— Salutations, Loups de Naomy ! fit Irène avec un léger signe de tête pour chacun.
— Salut à toi, Reine Equusienne ! lui lança Clément. Cela fait tant de temps que je n'ai pas vue ! Toujours aucune nouvelle de la populace, je présume ?
— Tu m'avais manqué, Clément. Non, je n'ai eu aucune nouvelle récente. Mais il est de plus en plus difficile pour moi d'attendre ma vengeance…
— Excusez-moi ! les interrompit Théodora avec sa douceur habituelle. Quelle est cette histoire d'Equusiens et comment avez-vous fait connaissance ?
— Voici brièvement les faits ! annonça Clément avant de raconter à Théodora l'histoire qu'Helene avait entendue de la bouche de Naomy quelques heures plus tôt. La famille royale du peuple d'Irène s'entendait tellement bien avec les Loups de Naomy… tant de bons souvenirs qui appartiennent à présent au passé ! soupira-t-il, mélancolique.
— Pourquoi votre déesse vous a-t-elle demandé de nous escorter jusqu'à Efi ? s'enquit la jeune Enchanteresse, intriguée.
— Naomy a pensé que vous pourriez avoir besoin d'aide, répondit Cassandre. Les événements récents nous le prouvent. Partons à présent, avant que d'autres korrigans ne soient attirés par la magie que notre arrivée à dégagée.

Elle se transforma et partit au galop vers le nord. Irène de métamorphosa, permettant à Hélène et Théodora de monter sur son dos, puis elle suivit Cassandre. Derrière eux venaient Clément et Alaric qui fermait la marche.